La famille a presque partout et presque toujours été la pierre dont les hommes se sont servis pour édifier leurs sociétés, des plus restreintes aux plus vastes. L'ère moderne a commencé avec le désir de faire table rase du passé, et l'ambition d'en établir de nouvelles qui fussent sans autres lois que celles qu'ils trouvaient à leur goût . De la perversité égolâtrique de Montaigne hier à l'apologie grossière des appétits les plus désordonnés aujourd'hui, en passant par l'hédonisme subversif d'un Sade, d'un Rousseau ou d'un Gide, sans même parler de la fausse naïveté d'un Tocqueville la réduisant à ce qu'elle a d'affectif, la famille a depuis trois siècles été constamment l'objet de l'indifférence, de l'incompréhension, du mépris ou même de la haine du plus grand nombre des esprits qui se sont voulus éclairés.
Comment s'en étonner venant d'hommes qui ont vendu leur âme aux démons du subjectivisme et se sont faits les adorateurs de leur nombril, sinon de ce qu'il y a dessous ? La famille exige de l'individu qu'il se reconnaisse membre d'un univers dont il n'est pas le souverain. Voilà la raison profonde de l'incompatibilité de l'institution familiale avec la modernité, comme le montrent et le démontrent ici les intervenants de ce Colloque.
Cahier n°17 - Nouvelle Série